Tumeurs, maladies cardio-vasculaires, maladies respiratoires chroniques ou diabète… Si les avancées scientifiques et la prévention ont largement fait reculer la mortalité, notamment liée aux maladies infectieuses, près de trois quarts des décès en France sont liés à des pathologies graves, souvent chroniques. 

L’éclairage de Marie-Pierre Racouët, infirmière, Ophélie Debert, psychologue, et Bruno Vincent, médecin, de l’Equipe Mobile de Soins Palliatifs – Douleur du cancer de l’hôpital Beaujon à Clichy (92, APHP Nord).

 

 

 

On peut mourir brutalement d’un accident (de voiture par exemple) ou d’une maladie (par exemple crise cardiaque), mais de plus en plus les personnes vivent avec une maladie chronique qui peut durer dans le temps et finir par un décès (la plus connue est le cancer). La plus ou moins lente évolution de ses maladies peut aider à se préparer psychologiquement à la séparation de la personne malade ; toutefois, vivre au quotidien avec une personne malade peut se révéler difficile, surtout quand elle est en fin de vie. Faire le deuil d’une personne, surtout quand elle nous est proche, n’est jamais simple.

Nommer la maladie, utiliser le jargon médical en le vulgarisant, et expliquer à l’enfant les effets secondaires

Avant de parler de la maladie avec l’enfant, il est important de faire le point sur ce qu’il sait et ce qu’il veut savoir : de cette façon, il est possible de répondre au mieux à ses interrogations sans aller trop loin et sans lui dire des choses qu’il n’a pas envie de savoir. Les enfants sont curieux, ils ont besoin de savoir ce qu’il se passe pour verbaliser leur inquiétude, leur colère, leur tristesse. Tout au long de la maladie grave d’un proche, leur parler, en utilisant des mots simples, en fonction de leur âge, leur évite de ressentir un abandon ou de la culpabilité.

Il faudra nommer la maladie (car de toute façon, un jour, ce mot apparaitra dans une conversation sans crier gare). Utiliser le jargon médical, parler par exemple de « chimiothérapie » ou de « rayons » dans le cas du cancer, en vulgarisant ce que signifient ces termes, c’est valider ce qu’ils ont déjà entendu. Il importe également de lui expliquer les effets secondaires de la maladie grave (« c’est comme les taches que l’on fait sur son T-shirt parce qu’on a mangé trop vite »), la fatigue, les douleurs ou éventuels vomissements que peuvent connaître la personne. On pourra aussi expliquer à l’enfant, selon l’évolution de la maladie, la possibilité que la personne séjourne à l’hôpital pour se sentir mieux et puisse peut-être revenir à la maison après. Les enfants n’ont pas la même capacité de compréhension que les adultes ou le même vocabulaire : tout au long de la conversation, il est donc important d’observer leur réaction, de faire verbaliser ce qui les questionne et de reformuler avec leurs mots.

Parler de la maladie et expliquer à l’enfant ce qui change et ce qui va changer, c’est lui permettre de comprendre et de s’adapter à la situation

Parler de la maladie et expliquer à l’enfant ce qui change et ce qui va changer, c’est lui permettre de comprendre et de s’adapter à la situation. Le fait de ne rien savoir est souvent plus difficile à vivre que d’être informé. La maladie grave d’un proche vient bousculer l’enfant, et, en fonction de l’âge, l’enfant ne va pas exprimer ce qu’il ressent de la même façon. Un enfant âgé pourra utiliser la parole, ce qui n’est pas le cas des plus jeunes ; plus les enfants sont petits, plus le mal-être qu’ils ressentent va se manifester par le corps. Certains signes doivent alerter les adultes, comme par exemple des maux de ventre ou de tête, qui apparaissent quand l’enfant doit se séparer de l’adulte (aller à l’école, avant de se coucher, etc.),  un changement de rythme dans ses activités et son sommeil, une régression qui se manifeste par le retour de comportements qu’il avait étant plus jeune (faire pipi au lit, sucer son pouce, etc.) ; des troubles de l’attention (« être dans la lune »). L’angoisse chez l’enfant peut aussi s’exprimer par de la colère, ou un repli sur soi, où il ne parlera pas ou très peu.

Une difficulté à s’exprimer chez l’enfant peut vouloir dire qu’il a le sentiment de ne pas pouvoir parler de ce qui l’inquiète à ses parents, soit parce que le sujet est tabou à la maison, soit parce qu’il ne veut pas faire de peine. Il cherche souvent à protéger en ne parlant pas. Parfois, l’enfant peut aussi se sentir coupable ou croire que la personne est malade à cause de lui. Il est alors important de le rassurer et de bien lui expliquer que ce n’est de la faute de personne. Il est nécessaire aussi d’expliquer à l’enfant que même si le comportement de la personne malade change – elle est fatiguée et ne peut par exemple plus le prendre dans les bras -, l’amour porté à l’enfant ne change pas.

Expliquer à l’enfant ce qu’est une maladie grave chronique

« Le corps humain est fabriqué de cellules invisibles à l’œil nu. Ces cellules sont à l’origine de la vie sur Terre ; elles sont présentes dans tout ce qui est vivant, comme les plantes, les animaux, les hommes, etc. Un homme a des milliers de cellules dans les muscles, les os, la peau et les organes (cœur, poumon, rein, os, etc.), et toutes ces cellules ont toutes des missions spéciales. Lorsqu’un médecin découvre une maladie grave, cela signifie que certaines cellules ne fonctionnent pas bien, font n’importe quoi et créent du désordre ; c’est donc différent d’une angine par exemple où le médecin peut se contenter de donner un médicament et où la personne guérit rapidement. »

« La maladie grave est une maladie chronique c’est-à-dire qu’elle dure longtemps et demande de prendre des médicaments pendant plusieurs mois ou plusieurs années, de faire un traitement (chimio, rayons, perfusion, etc.) ou des opérations chirurgicales. Il est parfois difficile de soigner les personnes gravement malades : certaines maladies ne guérissent pas, d’autres peuvent diminuer ou disparaître. Actuellement, des solutions sont possibles pour mieux à vivre avec. »

Expliquer à l’enfant ce qu’est un cancer

« Le cancer est un rassemblement de cellules anormales (qui font n’importe quoi), qui vont former une boule, que l’on appelle une tumeur. Parfois, elles vont partir dans la circulation du sang : tout cela c’est ce que l’on appelle le cancer (d’un organe ou du sang). Elles vont créer d’autres cellules pour contaminer et détruire l’organe. Dans notre corps, d’autres cellules vont essayer de se défendre en détruisant ces cellules anormales. Le corps n’a pas assez de défense parfois et doit faire appel à des médicaments spéciaux comme la chimiothérapie pour les détruire. C’est pour cela que l’on va souvent à l’hôpital voir les personnes qui soignent (médecins, infirmières…). Les chimiothérapies détruisent les cellules pour reconstruire de bonnes cellules mais cela fatigue énormément le corps. Il sera plus difficile alors de jouer ou faire à manger avec celui qui est malade … Il se peut qu’on perde du poids ou des cheveux avec la chimiothérapie : ce sont les effets secondaires. Malgré beaucoup d’efforts et de médicaments, cela ne marche pas toujours et parfois on meure. »

Expliquer à l’enfant les maladies neurodégénératives

« Les maladies neurodégénératives sont liées à une mauvaise connexion entre les cellules du cerveau, qui ne permet pas aux autres cellules de travailler correctement, comme dans un ordinateur qui « bug » et qui fonctionne mal. La maladie d’Alzheimer, la maladie de Parkinson sont liées à des cellules qui empêchent certaines informations d’arriver au cerveau. On peut ainsi avoir des tremblements, des mouvements anormaux ; cela peut bloquer les bras et les jambes ; on commence par oublier certains mots, certains souvenirs ; on oublie d’éteindre le four dans la cuisine ; on risque de se perdre dans la rue ; puis on ne reconnait plus ses proches, on parle moins et on se déplace moins ; on reste de plus en plus couché, parfois jusqu’à la mort. »

Expliquer à l’enfant les insuffisances d’organes

« Les insuffisances d’organes sont liées à des cellules qui n’arrivent plus à fonctionner normalement et faire leur travail. Il arrive que certains organes comme le rein (celui qui fabrique l’urine) ne puissent plus fonctionner. Les médecins vont donner des médicaments ou utiliser des machines pour filtrer le sang (dialyse), mais parfois cela ne marche pas. Pour les poumons, c’est pareil : parfois, on n’arrive pas à respirer normalement et il faut prendre des médicaments, respirer de l’oxygène avec un tuyau ou un masque. Parfois, il faudra aller à l’hôpital pour soigner un épisode plus grave, cela pourra passer par un endormissement temporaire pendant lequel on respire avec l’aide d’une machine. Cela ne marche pas toujours et l’on peut en décéder. »

Les ressources (téléchargements, lectures et vidéos)

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